Récemment médiatisées pour avoir financé les concerts sud-africains de l'Alma Chamber Orchestra, l'orchestre d'Anne Gravoin - la femme du premier ministre français Manuel Valls - les activités de l'homme d'affaires Ivor Ichikowitz dépassent le cadre du simple mécénat d'artistes. En 1994, ce Sud-africain a fondé le groupe d'armement Paramount. Il détient aussi une multitude de sociétés actives dans des secteurs très variés, de l'énergie à la finance en passant par le tourisme.


Soutien historique de l'African National Congress (ANC, le parti au pouvoir en Afrique du Sud depuis 1994), Ivor Ichikowitz - né en 1966 à Springs, province du Gauteng (Afrique du Sud) - a pu se lancer à grande échelle dans le business de l'armement dès la fin de l'apartheid. Proche de Winnie Mandela, la femme de Nelson Mandela, et partenaire en affaires de Moeletsi Mbeki, frère du deuxième président post-apartheid d'Afrique du Sud, Thabo Mbeki, il a vite bénéficié des réseaux des nouveaux maîtres du pays et de leur aura sur le continent. De même, il est lié à des hommes d'affaires influents proches du parti, comme Tokyo Sexwale et Robert Gumede. Toutefois, ce sont bien ses liens avec l'ex-trésorier général de l'ANC et businessman Mathews Phosa, proche collaborateur de Jacob Zuma, qui lui ont permis de vraiment décoller lors de l'accession de ce dernier à la tête de l'Etat.

Loin de se cantonner à la nation arc-en-ciel, Ivor Ichikowitz a rapidement rayonné dans le reste de l'Afrique (Gabon, Congo, Libye), mais aussi en Asie Centrale (Azerbaïdjan, Kazakhstan) et au Proche-Orient. Il compte parmi ses amis Jean-Yves Ollivier, connecté au plus haut niveau en Afrique de l'Ouest, ainsi que Souheil Rached, ancien collaborateur de Moussa Koussa, chef des services de sécurité libyens sous l'ère de Mouammar Kadhafi. En Asie centrale, le golden boy d'Astana, Kenges Rakichev, patron du fonds de capital-risque Singulari Team, et l'homme d'affaires azéri, Fuad Seyidaliyev, lui ont ouvert les portes des marchés de défense de la région.

Célèbre pour son goût du faste et du décorum, Ivor Ichikowitz se repose sur quelques proches collaborateurs, en premier lieu son frère, Eric Ichikowitz, qui a pris du galon au sein du groupe familial au fil des années. Pour piloter Paramount au quotidien, il fait confiance depuis près de vingt ans à John Craig et s'est associé, il y a une décennie, avec l'un des ingénieurs favoris de la South African Air Force (SAAF), Paul Potgieter, pour orienter sa stratégie dans l'aéronautique. En 2013, il avait racheté le fabricant d'avions et d'hélicoptères militaires, Advanced Technologies & Engineering (ATE), alors dirigé par le français Jean-Marc Pizano, récupérant ainsi les contrats du groupe avec plusieurs armées du continent africain.

Ivor Ichikowitz a en réalité constitué ses réseaux bien avant son entrée dans l'industrie de défense. Dans les années 1980 et 1990, le businessman était l'un des agents africains du négociant en matières premières, Glencore. Par la suite, Ivor Ichikowitz est aussi devenu un incontournable et un confident des puissants en ouvrant des lodges luxueux en Afrique australe. Ainsi, avec son ancien collègue de Glencore, Kirk Lazarus, il avait monté le Molori Safari Lodge, dans la réserve de Madikwe en Afrique du Sud, qui a accueilli des hôtes aussi prestigieux et influents que Nelson Mandela, le président zimbabwéen Robert Mugabe, l'ex-premier ministre kenyan Raila Odinga ou encore le boxer vedette américain Floyd Mayweather.

Ivor Ichikowitz est issu d'une famille juive d'Europe de l'est. Son grand-père, Charles Ichikowitz, arrivé en Afrique du Sud depuis la Lituanie dans les années 1930, avait fait fortune dans le commerce du bois. Son père, Louis Ichikowitz, s'était lui lancé dans l'importation de voitures du constructeur japonais Suzuki. Malgré la puissance financière de sa famille, Ivor Ichikowitz cherche depuis longtemps à renforcer son influence grâce à son organisation caritative : l'Ichikowitz Family Foundation. Celle-ci sponsorise tous azimuts, des dîners de l'ANC aux opérations anti-braconnage du parc Kruger, en passant par le mécénat d'artistes. Par ailleurs, Ivor Ichikowitz finance aussi des start-up dans les hautes technologies. En août 2015, il a investi deux millions de dollars dans PaidEasy, application de paiement sur smartphone créée par Gregg Jackowitz.